A Inzerki, le plus grand rucher traditionnel au monde ne bourdonne plus comme avant (Feature)

A Inzerki, le plus grand rucher traditionnel au monde ne bourdonne plus comme avant (Feature)

vendredi, 19 juillet, 2013 à 12:06

Par Houcine MAIMOUNI

Inzerki (province de Taroudant) – En ce mois de ramadan où la vente du miel s’envole en raison d’une demande galopante, le rucher d’Inzerki (près de 90 km au nord d’Agadir), le plus grand rucher collectif traditionnel au monde n’a pas entièrement désempli quoique le vrombissement des abeilles n’est plus aussi audible qu’auparavant.

“Bienvenue à Inzerki. D’habitude on sert aux visiteurs du miel et du thé. Au risque de vous mettre l’eau à la bouche, Ramadan oblige, on vous remettra ça une autre fois”, plaisante d’emblée, l’air jovial, Brahim Chatoui, président de l’Association Taddart Inzerki pour le développement et la coopération.

“Les abeilles sont calmes parce qu’on est en plein été. Au printemps, les visiteurs ne peuvent mettre les pieds au rucher en raison du bruit des abeilles. Ils se contentent de le photographier de l’autre côté de la vallée”, dira-t-il, en montrant de la main un monticule qui surplombe cette structure.

Situé dans la commune d’Argana sur la route nationale n 8 reliant Agadir à Marrakech à une altitude de 980 mètres en plein coeur du Haut-Atlas, ce rucher appelé aussi //Taddart Ouguerram// bénéficie d’une orientation sud qui lui assure un long ensoleillement. Cet emplacement est doublé d’un environnement très favorable à l’apiculture grâce à un couvert végétal très riche fait de thym, argan, thuya, romarin, chardon, palmier dattier, lavande et autres plantes mellifères.

Ce grenier collectif de miel, dont la création date de 1850 quoique son histoire remonterait au 17ème siècle selon la tradition orale, comprend un ensemble de constructions monumentales bâties en pisé et étalées sur plusieurs niveaux avec des compartiments formés de cases superposées par groupe de quatre.

“Ces compartiments comptaient environ 180 cases sur quatre rangées superposées pour un total de 720 cases. Chaque case contenait trois ruches fabriquées en roseau tressé, ce qui donne un total de 2 160 ruches”, reprend Mustapha Boutmourine, lui aussi un apiculteur de la région.

Selon des données du Conseil régional Souss-Massa-Drâa, la production annuelle de la région se situe aux alentours de 925 mille kg de miel (22 PC de la production nationale), à raison de 5 kg par ruche traditionnelle et 14 kg par ruche moderne, sachant que le miel produit par l’abeille noire et l’abeille saharienne (les plus résistantes aux pathologies et les plus productives) représenterait 159 millions de dh, soit 5 PC du budget de la région.

“Ici, l’apiculture est souvent l’unique source de revenu des familles locales pour notre région, du reste très connue pour la diversité de sa flore mellifère de montagne qui produit le meilleur miel du pays au goût de thym”, se félicite Mustapha, mettant l’accent sur l’impératif de faciliter l’accès au rucher pour développer le tourisme et d’accélérer le projet de création d’une maison du miel à Argana.

En 2010, le Maroc a importé 1540 tonnes de miel contre 1820 une année auparavant, la production nationale moyenne de miel (entre 3500 et 4000 tonnes selon les saisons), étant incapable de répondre à une demande déjà peu boulimique avec une consommation moyenne annuelle de 200 g par habitant.

Dans la région d’Agadir comme ailleurs au Maroc, le miel est, à bien des égards, un produit de saison fort prisé pendant les mois de chaâbane et ramadan tant et si bien que la plupart des marques réalisent pendant ces deux mois plus de 60 PC de leur chiffre d’affaires.

A ce propos justement, M. Chatoui soutient que “la demande est très forte, mais la production ne suit pas malheureusement”, assurant que la qualité du miel de mille fleurs produit à Inzerki a gagné une notoriété mondiale qui lui vaut un engouement hors des frontières, particulièrement de la France.

Aujourd’hui, Inzerki ne compte plus que huit familles au total, contre 80 ménages auparavant, déplore-t-il, ajoutant que près d’une cinquantaine de familles déposent encore de temps à autre leurs ruches dans cette célèbre structure qui n’en compte actuellement que 350, les autres apiculteurs préférant les mettre ailleurs par mesure de sécurité.

Et pour cause, le rucher d’Inzerki, qui a fait l’objet d’une restauration dans les années 1980, n’a pas résisté aux violentes crues de 1990 et 1996 ayant causé l’écroulement de plusieurs compartiments. La sécheresse, conjuguée à la dégradation de la flore, a causé la transhumance des apiculteurs et de leurs colonies d’abeilles ailleurs, entraînant le délaissement du rucher pendant des décennies.

En 2006, cette structure a été restaurée avec le soutien de l’Usaid dans le cadre du développement du tourisme rural, une opération qui n’a pas fait l’unanimité des apiculteurs du fait qu’elle a remplacé le thuya par l’eucalyptus et n’a tenu compte ni du cachet authentique du rucher ni de l’étanchéité ou du problème d’évacuation des eaux de pluie.

“Nous en appelons aux ministères de la Culture, du Tourisme et de l’Agriculture et de la pêche maritime : Un patrimoine culturel et menacé, le plus grand et le plus ancien rucher traditionnel au monde tombe en ruines”, martèle M. Chatoui, précisant que son Association n’a cessé de multiplier les initiatives pour inscrire ce monument sur la liste du patrimoine national d’abord et pourquoi pas dans la liste du patrimoine universel.

Pour Hassan Aboutayeb, président du Réseau du développement du tourisme rural (RDTR) et propriétaire d’un éco-lodge aux environs d’Agadir, le rucher Inzerki devrait, au-delà de son intérêt apicole avéré, servir d’un haut lieu d’attraction touristique tant il constitue une des plus belles curiosités de la région.

Il va sans dire que, dans l’entretemps et au moment où les préparatifs vont bon train pour la tenue du 6ème festival du miel, les apiculteurs de la région, autant que les intervenants institutionnels concernés et les partenaires du Pays d’accueil touristique auront tout à gagner en oeuvrant de concert pour rendre au rucher d’Inzerki son attrait d’antan et aux abeilles leur bourdonnement naguère audible à des kilomètres à la ronde.

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