En chômage saisonnier, Lahcen s’en remet à la générosité des gens

En chômage saisonnier, Lahcen s’en remet à la générosité des gens

vendredi, 26 juillet, 2013 à 10:45

Par Khalid Abouchoukri. 

Casablanca – Assis à même le trottoir, adossé au mur les genoux sous le menton et les bras croisés ceinturant ses tibias comme pour éviter que ses membres inférieurs ne s’allongent pour occuper plus d’espace, son grand chapeau multicolore enfoncé sur la tête, Lahcen croupit, comme l’eau au fond d’une mare, dans l’inactivité forcée en ce mois de Ramadan.

Celui qui ne passait jamais inaperçu grâce à sa robe d’un rouge éclatant parsemée de coupelles de cuivre et sa “tarazza” (chapeau de paille recouvert de laines rouge, jaune et verte) tout en faisant sonner sa cloche pour attirer les “assoiffés” en quête d’eau rafraichissante, semble endormi, anesthésié, son outre en peau de chèvre ornée de pièces de monnaies anciennes et “dégonflée” étalée à ses pieds sur le carrelage.

Sans qualification professionnelle et moissonneur de son état dans la région de Jemaa Mtal (Doukkala), il était poussé au chômage, commençait à tourner en rond et à dépérir à pratiquement ne rien faire face à l’avancée des tracteurs de plus en plus utilisés lors des moissons.

Sur insistance de son frère aîné, il descend à Casablanca pour se voir ainsi ‘inoculer” le virus de la guerba ‘pour gagner ton pain”, persista son frère en lui montrant l’outre en peau de chèvre. “Avec le jeûne, nous nous remettons à la bonté des gens”, explique ce porteur d’eau qui, à sa manière, animait à longueur de journée surtout en temps de chaleurs les espaces où il y a foule avec une prédilection pour la place des Nations Unies dans le centre-ville réaménagée et réappropriée, depuis peu, par les promeneurs.

Un peu plus de six ans après de son “débarquement” dans la métropole, l’outre lui colle à la peau. A l’entame de chaque journée de labeur, Lahcen rend grâce à Dieu avant d’enfiler son “rouge du travail” pour être gratifié des faveurs du Miséricordieux.

Cet arrêt forcé fait que sa journée devient longue comme un jour sans pain. Juste avant les prières d’Al Ichaa et Tarawih, Lahcen s’installe sur son nouveau ‘lieu du travail” à quelques mètres de la sortie d’une mosquée aménagée dans une Kissariat sur le Bd de la Résistance et ce, dans l’espérance de susciter la solidarité et la générosité des gens.

Jusqu’à la veille de ce mois, trimbalant son attirail, il “concurrençait” par sa clochette, le new “Guerrab” casablancais ultra moderne, le tramway, sur cet espace aménagé, rénové et piétonnisé de sept hectares entre l’ancienne médina et les bâtiments extra-muros de cette place et du Bd Mohammed V, un livre à ciel ouvert de l’architecture art déco de la première moitié du XXe siècle avec l’accumulation de façades d’immeubles richement décorées.

Avec ses timbales en cuivre jaune scintillant ou en terre cuite, il se retient par pudeur, peut-être extrême gentillesse, d’harceler les passants sur cette place bondée et bien exposée au soleil mais offrait, à ses compatriotes comme aux touristes, ses gobelets d’eau désaltérante avec un goût d’huile de cade, sans toutefois aller jusqu’à leur mettre la tasse sous la gorge. Il écoulait le contenu de son outre, deux fois par jour, sans manquer, à leur demande, quelques photos avec des visiteurs étrangers ‘mais de moins en moins”, regrette-t-il.

Sans aller jusqu’à faire la manche en tendant la main aux passants, Lahcen, la quarantaine bien révolue, s’en remet à la générosité des passants pour compenser les pertes sèches, indemniser ce chômage saisonnier, ne levant sa tête que pour gratifier son bienfaiteur ‘Allah Yakhlef fi had nhar Al moubarak” (que Dieu vous le rend en ce jour béni).

“Hamdou Allah (Louange à Dieu), même vide, la guerba me rapporte dans les quarante dirhams, de quoi me suffire pour vivre au jour le jour”, dit-il avec philosophie et un brin de tristesse dans la voix comme désolé de ne plus gagner son pain à la sueur de son front.

‘En ce mois de clémence, les Marocains sont plus généreux. Pas de revenus réguliers, cela dépend de l’altruisme des gens et des jours”, affirmant, entre deux reconnaissances à l’adresse de passants magnanimes, qu’il n’en est pas ‘encore réduit à la mendicité” et surtout n’en fait pas une profession. Question de fierté.

Ses outils de travail, exposés bien visiblement, sont là pour étayer ses dires de simple chômeur saisonnier, comme un solide alibi pour se disculper, aux yeux des âmes charitables, de l’exercice de mendicité.

Samedi soir, il retrouvera, le temps d’un match amical de football (Raja Casablanca-Mouloudia d’Alger), du c ur à l’ouvrage en rôdant avec sa guerba du côté du complexe sportif Mohammed V pour hydrater une partie de ceux qui vont chanter à plein gosier avec la perspective d’une meilleure recette, si, toutefois, les fans sont comblés par le résultat.

Lire aussi

La reprise du dialogue social illustre la volonté du gouvernement de parvenir à des solutions au profit de la classe ouvrière (Baitas)

jeudi, 28 mars, 2024 à 22:03

La reprise du dialogue social illustre la volonté du gouvernement de parvenir à des solutions à même de soutenir la classe ouvrière, a souligné, jeudi à Rabat, le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas.

La régulation du transport via les applications intelligentes tributaire du consensus entre les professionnels du secteur (ministre)

jeudi, 28 mars, 2024 à 20:38

La régulation du transport via les applications intelligentes est tributaire du consensus entre les différents intervenants dans le secteur du transport en commun au sujet de l’introduction de ce mode de transport sur le marché, a affirmé, jeudi, le ministre du Transport et de la Logistique, Mohamed Abdeljalil.

Produits alimentaires : 5.470 infractions constatées du 1er janvier au 27 mars

jeudi, 28 mars, 2024 à 20:08

Un total de 5.470 infractions a été constaté du 1er janvier au 27 mars, suite aux opérations de contrôle des prix et de la qualité des produits alimentaires effectuées par les commissions centrales et locales, selon la Direction de la Concurrence, des Prix et de la Compensation relevant du ministère de l’Économie et des Finances.