M. Benaissa : Asilah pionnière à poser l’équation culture-développement (Entretien)

Rabat – Asilah est en droit de s’enorgueillir de faire figure de ville pionnière à mettre la question culturelle au cœur de toute entreprise de développement porté sur l’efficience et la durabilité, a affirmé le président du Forum d’Asilah, Mohamed Benaissa.

“A Asilah, nous étions les pionniers à avoir posé l’équation de la question culturelle dans son rapport au développement”, a souligné M. Benaissa dans une déclaration à la MAP, à la veille du coup d’envoi de la 35ème édition du Moussem culturel d’Asilah prévue du 21 juin au 5 juillet.

Il a estimé que la donne culturelle tire son importance de la quintessence même du développement en tant que processus initié par l’homme et pour l’homme, tant est si bien que toutes les initiatives et tous les projets visant à affiner les talents et à stimuler la créativité se trouvent ipso facto au cœur du processus de développement.

Soutenant que la tenue d’activités culturelles participe du souci d’animer la ville et d’en accroître l’attractivité auprès des visiteurs et de l’investissement productif, il a fait observer qu’Asilah n’avait pas cette stature il y a 35 ans, exprimant par la même sa gratitude à SM le Roi Mohammed VI qui a entouré de sa haute sollicitude, depuis qu’il était Prince héritier, ce projet culturel qui a conféré à Asilah une place singulière aux échelons national et arabe.

Pour lui, l’affluence d’élites arabes et internationales vers Asilah aura permis de lancer des passerelles d’échanges et de contacts pour faire valoir ce que la démocratie a de plus fondamental: l’écoute de l’Autre. Et à ce titre, le moussem culturel international d’Asilah peut se targuer d’avoir servi d’école en matière de dialogue et d’échange d’approches au sujet de l’actualité mondiale et du vivre-ensemble.

Sur les moments forts devant ponctuer cette 35ème édition, il a évoqué un colloque portant des regards croisés sur “le printemps arabe” (28/29 juin) qui aspire à ouvrir une nouvelle perspective en terme d’approche des révoltes arabes à la faveur de nouvelles grilles de lecture des événements en cours dans des pays comme la Tunisie, le Yémen, l’Egypte et la Syrie.

Ce colloque, qui se déclinera en quatre séances, devra approcher les événements ayant émaillé les soubresauts populaires et les réactions des dirigeants arabes avec un accent particulier sur les perspectives des mutations transitoires, a-t-il signalé, relevant la présence d’intervenants d’envergure, dont l’ancien ministre égyptien des AE et ancien secrétaire général de la Ligue arabe Amr Moussa, l’ancien Premier ministre libyen Mahmoud Jibril, l’ancien ministre jordanien des AE Marwane Maâchar, les anciens ministre espagnol et portugais des AE, respectivement Miguel Angel Moratinos et Louis Amadou, en plus de l’intellectuel et penseur libanais Ghassane Salamé.

M. Benaissa a estimé que le monde arabe n’a pas suffisamment prêté l’oreille aux points de vue du reste du monde au sujet des vagues contestataires ayant submergé la région, hormis ceux d’Europe et des USA, d’où l’intérêt de s’ouvrir, à Asilah, sur des voix autres portées par des acteurs et des chercheurs d’Afrique et d’Amérique Latine.

Fidèle à sa tradition de célébrer la littérature et la création, le moussem culturel d’Asilah rendra hommage cette année à l’écrivain marocain Ahmed Al Madini, avec à la clé un focus sur son parcours de romancier, journaliste et critique, en présence d’une pléiade de ses connaissances et amis venus du Maroc, d’Egypte, de Jordanie, de Palestine, de Tunisie et d’ailleurs.

C’est aussi une occasion, a-t-il poursuivi, de rendre hommage aux multiples apports de cet écrivain hors pair qui a marqué de son empreinte la littérature marocaine en lui ouvrant de nouvelles pistes d’explorer autrement l’écriture romanesque.

Dans le cadre du festival d’Asilah, l’université d’été Al Mouâatamid Ibn Abbad propose une série de colloques portant, entre autres, sur le “changement climatique et sécurité alimentaire: entre approche technique et efficience humaine” (21/23 juin), le “nouveaux aspects d’orientalisme dans les arts plastiques arabes modernes” (25/26 juin), l’ “identité, diversité et sécurité culturelle” (1/2 juillet) et le “paysage médiatique dans les pays du CCG à la lumière des développements dans la région” (3/4 juillet).

Le moussem culturel d’Asilah sera également ponctué par la remise du 5ème Prix Mohamed Zefzaf du roman arabe, le 30 juin, sans omettre une riche palette de soirées musicales animées par une constellations d’artistes et de troupes venus du Sénégal, du Maroc, d’Espagne et du Portugal, outre les activités traditionnelles du moussem, en l’occurrence les ateliers de gravure, d’arts plastiques, de peintures murales et d’écritures pour enfants.
Propos recueillis par Nizar LAFRAOUI.