Portugal : la reprise économique a-t-elle profité à l’emploi et aux travailleurs ?

Portugal : la reprise économique a-t-elle profité à l’emploi et aux travailleurs ?

mardi, 20 février, 2018 à 11:00

              Par Hasnaa ELAKKANI

 Lisbonne – L’économie portugaise a enregistré l’année dernière un taux de croissance de 2,7 pc, supérieur à la moyenne européenne, et le plus élevé depuis 17 ans dans le pays. Mais à quel point cette dynamique remarquable s’est-elle répercutée sur le niveau des salaires et la qualité de l’emploi ?

Le chômage a en effet reculé à 8,9% en 2017, avec la création de 286.000 postes d’emploi depuis l’avènement du gouvernement socialiste en 2015, d’une part. De l’autre, les entreprises estiment les besoins en main-d’œuvre à près de 147.000 personnes, notamment dans les industries traditionnelles, la construction, l’hôtellerie et la restauration.

Paradoxalement, le poids des emplois précaires reste aujourd’hui plus élevé qu’au temps de la troïka, selon des données publiées récemment par l’Institut national des statistiques (INE).

L’emploi précaire demeure le type de postes qui a connu la plus forte croissance au Portugal et au rythme le plus élevé de la série de l’INE, datant du début 2012. Ce sont les contrats de prestation de services (Reçus verts) exemptant l’employeur des charges sociales, le travail saisonnier sans contrat écrit et les situations de travail ponctuel ou occasionnel qui ont le plus progressé.

En dépit de la forte reprise de l’emploi (12% de plus depuis la mi-2014), l’univers des contrats à terme a connu une croissance beaucoup plus rapide (+18%) tandis que les contrats à durée indéterminée ont eux aussi progressé mais plus lentement avec seulement 10%.

“Le Portugal risque de ne jamais quitter le modèle des bas salaires et du travail précaire”, estime le quotidien Jornal de Noticias, rappelant que les contrats de travail signés depuis 2013 et toujours en vigueur jusqu’en novembre 2017 sont principalement précaires, et les salaires sont encore très bas au niveau national.

Une étude réalisée par l’Observatoire des Crises et Alternatives, de l’Université de Coimbra, a conclu que la reprise économique est réalisée grâce essentiellement à des activités telles que le commerce,  l’hôtellerie et la restauration, des secteurs à faible productivité et qui ne nécessitent pas de travailleurs hautement qualifiés ou stables.

Par exemple, dans un secteur très dynamique comme le tourisme, qui bat des records depuis 2014, avec des recettes dépassant les 12 milliards d’euros, les salaires ne semblent pas suivre ce même rythme. 

D’après l’INE, l’année dernière, le salaire net moyen payé dans le secteur de “l’hébergement, la restauration et les activités similaires” ne dépassait pas 632 euros, soit une hausse de 41 euros par rapport à 2014 lorsque l’activité a commencé à croître, et seulement de 45 euros par rapport à 2011, l’année pendant laquelle la troïka a fait son entrée dans le pays.

Pour les syndicats, le problème réside dans la «politique des bas salaires et du travail précaire» qui incitent «les meilleures compétences à émigrer», au moment où les organisations patronales parlent d’inadéquation entre l’offre et la demande.

Le Syndicat des travailleurs de l’industrie hôtelière, du tourisme, des restaurants du Nord estime dans ce sens que les pénuries en main d’œuvre dans ce secteur s’expliquent par la qualité du travail offert.

“Le problème reste les bas salaires, les mauvaises conditions de travail, les heures de travail, le non-paiement des vacances, les rythmes de travail, le travail illégal et clandestin…etc”, a expliqué le syndicat, cité par Diario de noticias.

Dans un rapport publié l’année dernière, la Commission européenne s’était félicitée des réformes structurelles menées sur le marché du travail, faisant observer que la croissance de l’emploi était supérieure à celle du PIB jusqu’en octobre 2017, une évolution liée au tourisme, à la construction et à l’industrie. Elle avait noté en revanche que “la croissance des salaires reste globalement faible”, puisque la création de l’emploi se fait en majorité dans des secteurs n’exigeant que peu de qualifications.

Sur ce dernier point, le gouvernement qui avait promis au début de son mandat de tourner la page de l’austérité et restituer les revenus, semble être conscient de la nécessité de promouvoir une main d’œuvre qualifiée capable d’attirer les investissements à forte valeur ajoutée. 

Le Premier ministre portugais, Antonio Costa, a d’ailleurs donné la semaine dernière le coup d’envoi à la “Feuille de route de l’innovation” qui vise à diffuser les bonnes pratiques en matière de valorisation des connaissances et de R&D, à travers la qualification des ressources humaines, l’amélioration des compétences numériques dans la société portugaise et le renforcement de l’investissement dans l’innovation. 

Le chef du l’exécutif socialiste qui avait affirmé en mai dernier que le modèle d’économie compétitive qu’il veut construire “ne peut pas être fondé sur les bas salaires”, faisant de la lutte contre la précarité une “priorité absolue” pour son gouvernement. Saura-t-il honorer sa promesse ?.

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