Tifinagh: de l’écriture lybique à l’aménagement graphique

Tifinagh: de l’écriture lybique à l’aménagement graphique

samedi, 11 janvier, 2020 à 16:10

Par: Al Mustapha SGUENFLE

Rabat – Le Maroc est un pays où existe une solide tradition de transcription de l’amazigh en lettres arabes, notamment dans la région du Souss. Toutefois, cette tradition n’a pas effacé toute trace de l’alphabet originel de l’amazigh, le tifinagh, dont les lettres ornent rochers et épitaphes le long d’étendues aires géographiques du Royaume et dans l’ensemble de l’Afrique du Nord.

Nombre de ces traces remontent à des époques lointaines et renvoient à ce que les spécialistes appellent l’écriture libyque, en référence au nom que les Grecs anciens utilisaient pour désigner les Amazighs.

Selon El Mahfoud Asmahri, chercheur à l’IRCAM, cette graphie était utilisée en Afrique du Nord plusieurs siècles avant l’arrivée de l’Islam, avant de disparaître graduellement dans les zones jouxtant la Méditerranée.

Le tifinagh a toutefois été conservé chez les nomades vivant dans les zones désertiques, restés à l’écart des influences des écrits méditerranéens antiques, a ajouté ce chercheur dans l’histoire antique de l’Afrique du Nord dans une déclaration à la MAP.

Et M. Asmahri d’expliquer que les spécialistes ont distingué trois branches régionales de l’écriture libyque ou libyco-berbère, l’une située à l’est de l’Afrique du Nord (l’aire s’étendant entre la Libye et l’est de l’Algérie actuelles), l’autre à l’ouest du Maroc antique et l’ouest de l’Algérie actuelle, tandis que la troisième variante était usitée dans l’espace saharien, où les Touaregs ont assigné une fonction symbolique au tifinagh.

Tombé en désuétude des siècles durant, le tifinagh a opéré son retour au Maroc à partir de la deuxième moitié du siècle dernier par le biais des associations de promotion des droits culturels et linguistiques amazighs.

Depuis le discours prononcé par SM le Roi Mohammed VI en 2001 à Ajdir, l’importance de la graphie tifinagh n’a cessé de s’accroître. Suite à la constitutionnalisation de la langue amazighe au Maroc en 2011, le processus d’adoption du tifinagh connaîtra un coup d’accélérateur.

Il a ainsi figuré au cœur de l’un des chantiers les plus importants sur lesquels se sont attelés les chercheurs de l’Institut royal de la culture amazighe (IRCAM), à savoir la codification et l’aménagement de la graphie tifinagh pour transcrire et diffuser la langue amazighe standard au Maroc.

“Le tifinagh est le principal moyen technique servant à porter la langue amazighe, la transcrire et l’intégrer dans tous les domaines, en particulier ceux qui jouissent d’une haute priorité, tels que l’enseignement, les médias et la traduction”, a déclaré à la MAP Abdeslam Boumisser, chercheur au centre d’aménagement linguistique de l’IRCAM.

D’après lui, le processus d’aménagement graphique du tifinagh s’appuie sur des choix méthodologiques précis et graduels qui, à leur tour, reposent sur des principes de base comme l’historicité, l’économie et l’harmonisation.

Il s’agissait aussi de respecter le principe de non-ambiguïté, qui signifie que chaque son équivaut à une lettre, outre celui de la simplicité qui consiste à libérer le système graphique proposé de toute complication technique pouvant limiter sa diffusion.

Cette entreprise a nécessité une étude minutieuse des cas de transcriptions en tifinagh dans des contextes antérieurs et une familiarisation avec les aspects des différentes graphies adoptées, a noté le chercheur.

Et M. Boumisser d’ajouter que deux études de terrain ont été menées par l’IRCAM en partenariat avec le ministère de l’Éducation nationale en 2010 et 2012, lesquelles études ont témoigné du succès de l’aménagement graphique du tifinagh.

La première étude était d’ordre diagnostique et portait sur l’apprentissage de la lecture et de l’écriture à l’aide de la graphie tifinagh, tandis que la seconde portait sur l’évaluation des résultats scolaires des élèves du cycle primaire de la langue amazighe à travers la lecture et l’expression écrite.

Il ressort de ces deux études que l’apprentissage de la lecture et de l’écriture par l’intermédiaire de l’alphabet tifinagh ne représente pas de difficultés pour les apprenants, a noté Abdeslam Boumisser.

Par ailleurs, le tifinagh a réussi à investir l’espace public national en figurant sur les devantures de certaines institutions publiques et privées, s’est félicité M. Boumisser, ajoutant que cette graphie figure également sur certains sites électroniques, et a servi pour la publication de diverses études et traductions.

Au niveau continental, la graphie tifinagh, telle qu’aménagée par l’IRCAM, a pu servir à la transcription de la langue amazighe dans certains pays du Grand Maghreb, comme l’Algérie, la Libye et la Tunisie. Des sessions de formation ont été organisées à cet effet pour permettre à différents utilisateurs d’en maîtriser l’usage.

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