L’Algérie au bord du cataclysme économique

L’Algérie au bord du cataclysme économique

mercredi, 27 mai, 2015 à 14:01

Jamal CHIBLI

Rabat – Le marasme économique en Algérie a atteint un stade où les tranquillisants ne pouvaient plus calmer la douleur, au point que le Premier ministre Abdelmalek Sellal, connu d’ailleurs pour son optimisme béat, est passé à table pour dire les quatre vérités de la santé financière chancelante du pays.

Le constat de l’indéboulonnable chef de gouvernement, en dépit de trois remaniements en à peine deux ans et demi, est limpide, incisif et dantesque. Et ce, après plusieurs mois de déni. Les perspectives sont aussi sombres que toutes les solutions envisagées auront un coût élevé sur le front social.

“La situation à laquelle est confronté notre pays est délicate. Nous devons tous en être conscients. La baisse des prix des hydrocarbures risque de s’étaler dans le temps et d’impacter négativement les ressources du pays”, a reconnu M. Sellal, en président lundi une réunion des hauts responsables financiers et énergétiques.

L’économie algérienne est, donc, au bord d’un cataclysme qui n’a d’égal que la situation ayant suivi le choc pétrolier des années 1980. Ce fut le prélude du soulèvement populaire du 5 octobre 1988, qui a été réprimé dans le sang.

Les caisses vides, le pays s’était, alors, jeté dans les bras des bailleurs de fonds internationaux, dont le “coup de main” a précipité la compression des dépenses sociales et des subventions, les éternels amortisseurs de l’implosion sociale.

La soudaine prise de conscience n’a pas laissé de marbre le chef du parti Jil Jadid, Soufiane Djilali, l’une des figures de proue de l’opposition algérienne, qui a adressé un sévère réquisitoire au pouvoir de son pays.

“Après avoir dilapidé les biens de la nation, pioché sans aucune précaution dans les caisses de l’Etat, distribué à tout vent l’argent public sans aucun contrôle et en dehors de toute loi ( ), enrichi les copains et les coquins, acheté la paix sociale en cultivant la corruption des âmes et des esprits, voilà que ces messieurs s’inquiètent pour l’avenir de nos réserves de change tout en nous annonçant un futur endettement”, assène-t-il dans une déclaration rendue publique mardi.

Tant redouté par les experts et observateurs locaux qui criaient leurs inquiétudes sur tous les toits, sans que personne ne leur accord le moindre crédit, le scénario-catastrophe est en voie de se matérialiser.

Dans quatre ans, les réserves en devises, qui ont longtemps fait la force et la fierté du régime algérien, ne dépasseront guère les 9 milliards de dollars avec une moyenne de 50 dollars le baril. Deux ans en arrière, le pays disposait de quelque 200 milliards de stocks de change.

Le comportement de la balance commerciale pourrait être un indicateur édifiant pour ce qui va venir. A fin avril dernier, le commerce extérieur algérien a enregistré un déficit de 4,32 milliards de dollars. Une situation inédite depuis belle lurette. Faut-il rappeler que le pays a réalisé un excédent de plus de 20 milliards de dollars en 2012.

Autre élément d’information fourni par le Premier ministre, les recettes des hydrocarbures ont baissé de 7,8 milliards de dollars au premier trimestre de l’actuel exercice. Soit des pertes quotidiennes de près de 87 millions de dollars. Un chiffre qui dépasse de très loin les prévisions des experts qui évoquaient un manque à gagner de 50 millions de dollars par jour.

L’Algérie perdrait, selon ce schéma, la moitié de sa manne pétrolière et gazière en fin d’année. Les hydrocarbures assuraient des recettes de plus de 60 milliards de dollars par an et représentait 96 pc du volume global des exportations.

Outre la baisse drastique des revenus, Abdelmalek Sellal s’est aussi plaint de la hausse fulgurante de la consommation domestique d’énergie, allant jusqu’à rendre ses concitoyens coupables d’un “gaspillage intolérable”.

“Si les réserves restent en 2030 à leur niveau actuel, nous n’allons couvrir que la demande nationale, il en restera très peu pour l’exportation”, avait expliqué, il y a quelques mois, M. Sellal, ce qui a été interprété en son temps par une tentative de légitimer l’exploitation du gaz de schiste qui a rencontré une résistance farouche des populations du Sud.

Des statistiques du ministère de l’Energie démontrent que la demande énergétique interne pourrait doubler dès 2024 si la consommation continue à progresser de 7 pc par an, ce qui devrait générer une facture énergétique à 80 milliards de dollars à l’horizon 2030.

Faisant dans la demi-mesure, ce qui lui a été constamment reproché par ses détracteurs, M. Sellal plaide la rationalisation pour faire baisser la facture énergétique, sans pour autant toucher aux prix à la pompe.

Ceci dit, les observateurs locaux assimilent la question de l’effondrement des prix du pétrole à l’histoire de l’arbre avec lequel on veut cacher la forêt. Une sorte de mur des lamentations, alors que le mal est plus profond.

Ils mettent en cause la remarquable gabegie des années fastes, durant lesquelles le pouvoir a suivi une politique hautement dépensière pour s’assurer la paix sociale par des subventions à tous vents, bouchant les oreilles à tous les appels de diversification des sources de revenus, d’incitation à la productivité et d’amélioration de la compétitivité des entreprises nationales.

Des vœux restés pieux puisque le système bancaire, qualifié d’archaïque, n’a jamais réussi à se moderniser malgré les multiples mesures prises à cet effet. L’Etat a favorisé l’importation monopolisé par des cercles proches du pouvoir. Le climat d’affaires n’est attrayant ni pour les locaux ni pour les étrangers à cause d’une législation désuète et anachronique, à l’instar de la règle 51/49 (associé algérien toujours majoritaire).

Les nombreux scandales de corruption devant les tribunaux ont donné l’étendue des pratiques frauduleuses dans le domaine des marchés publics, utilisés par le pouvoir dans le dessein de se payer une aura sur la scène mondiale.

En optant pour le langage de vérité, le pouvoir algérien chercherait, à l’unanimité des commentateurs, à préparer ses citoyens à de futures mesures douloureuses, à moins de susciter l’effet contraire en précipitant l’éclatement d’une colère qui couve.

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