L’interaction entre l’Islam et les sociétés africaines en débat

L’interaction entre l’Islam et les sociétés africaines en débat

vendredi, 29 mars, 2024 à 13:05

Salé –  L’interaction entre l’Islam et les sociétés africaines au fil de l’Histoire du Continent a été au centre de réflexion lors d’une soirée débat organisée jeudi au siège de la Fondation Abderrahim Bouabid à Salé, sous le thème “Penser l’Islam depuis l’Afrique”.

Introduisant la table ronde inaugurale cet événement, axée sur la thématique “Penser l’Islam depuis l’Afrique: quelle contribution des penseurs africains de l’Islam à l’échelle internationale?”, Mohamed Achaari, président de la Fondation Abderrahim Bouabid, a souligné l’importance de cette conférence qui, en plus de permettre l’étude de l’Islam africain dans ses dimensions religieuses, politiques et culturelles, représente un “projet ambitieux” visant à établir une réflexion commune sur l’Islam depuis l’Afrique.

“Partir de l’histoire sénégalo-marocaine n’est pas une question fortuite”, a-t-il précisé, notant que cette histoire commune reflète “une expérience unique de transmission, de savoir et d’échange”, touchant aux manifestations doctrinales, sectaires et soufies et ayant permis à un certain nombre de penseurs subsahariens de présenter une riche expérience de lecture de l’Islam à partir de leur patrimoine culturel, linguistique et émotionnel.

De son côté, le ministre des Habous et des Affaires islamiques, Ahmed Toufiq a mis en avant des éléments historiques et d’actualité en rapport avec la thématique abordée, notamment au sujet de la présence des Subsahariens au Maroc, des relations commerciales et spirituelles du Royaume avec les pays subsahariens et des principaux défis posés par l’émergence du rigorisme dogmatique islamiste pour les pays d’Afrique.

Historiens et anthropologues affirment que de la préhistoire au Moyen Age, le grand désert africain n’a jamais constitué “un obstacle” à ces interactions, a-t-il indiqué, ajoutant que la présence subsaharienne au Maroc a profondément marqué, matériellement et intellectuellement, le Royaume.

Le ministre a indiqué à cet égard que son département est “en train de monter un musée à Marrakech, qui portera le nom de +Marrakech l’Africaine+, où seront exhibés des supports interprétatifs qui attestent le cachet culturel subsaharien de Marrakech dans différents domaines”, expliquant qu’entre le XIème et XVème siècle, les rives du fleuve Sénégal et du fleuve Niger ont vu prospérer des royaumes et des empires qui ont entretenu des relations riches et étroites avec le Maroc, la religion et la culture musulmanes ayant été “le tissu vif” de ces relations.

“Par sa force d’adaptation, cet Islam a survécu sans sacrifier des éléments d’une identité culturelle et sociale”, a-t-il relevé, indiquant que ces royaumes et empires ont servi d’intermédiaires avec le nord dans le commerce de l’or, des esclaves, ainsi que des livres.

Ces siècles d’échange entre le Maroc et l’Afrique subsaharienne ont donné au Royaume “les traits caractéristiques de son identité africaine”, a souligné le ministre, ajoutant qu’ils ont vu également le Maroc contribuer à l’intégration intellectuelle de cette Afrique subsaharienne au monde méditerranéen par le biais de la culture et de l’Islam.

Saluant la collaboration qui lie l’Institut français du Maroc (IFM) et la Fondation Abderrahim Bouabid, Agnès Humruzian, Directrice générale de l’IFM et Conseillère de coopération et d’action culturelle, a quant à elle affirmé que ce type d’événement favorisant l’échange d’idées entre le monde de la recherche, les experts et le grand public est plus que nécessaire dans un monde où les informations circulent vite, brouillant parfois les frontières entre le vrai et le faux.

Les interventions lors de cette table ronde ont porté sur divers sujets, dont la place et le rôle du soufisme et des confréries en Afrique, le rapport entre Islam et arabité et l’influence du colonialisme sur la perception de l’Islam en Afrique du Nord et en Afrique subsaharienne.

Appelant à sortir du “tout soufisme” concernant l’Afrique subsaharienne, l’Islamologue, maître de conférences à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco, Paris), Youssouf Sangaré a souligné que l’Afrique n’est pas seulement “un lieu de réception passif” de l’Islam, mais aussi un lieu où les nouvelles pensées théologiques émergent et où les érudits s’intéressent à ces dynamiques religieuses.

Pour sa part, Amadou Hamidou Diallo, Docteur en civilisation islamique et sciences sociales et maître de conférence titulaire en histoire de la philosophie moderne et contemporaine, est revenu sur l’ancrage de la religion musulmane et les formes d’appropriation dont elle fait l’objet au sein de la communauté peule (Populations nomades et sédentaires réparties sur de très vastes territoires en Afrique de l’Ouest, du Sénégal au Tchad).

Dans son intervention, M. Diallo, également directeur adjoint de la Faculté des Sciences de l’Education, de la Formation et du Sport (SEFS) de l’Université de Gaston Berger de Saint-Louis, a noté que la plupart des recherches et des textes académiques montrent la manière avec laquelle l’Islam a été transformé en Afrique, sans pour autant s’attarder sur la manière avec laquelle il a impacté les sociétés africaines.

Youssef Belal, actuel diplomate des Nations-Unies couvrant les négociations de paix dans la Corne de l’Afrique, anthropologue et politologue, s’est focalisé, pour sa part, sur la diffusion de l’Islam en Afrique et la relation entre religion et espace géographique, évoquant notamment le cas de l’Afrique du Nord et le statut particulier de la langue arabe dans la production des savoirs islamiques.

Organisée par la Fondation Abderrahim Bouabid et l’Institut français, en collaboration avec le Centre Jacques Berque (CJB), l’Institut Fondamental d’Afrique Noire à Dakar (IFAN), l’Université Internationale de Rabat (UIR) et l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales à Paris (INALC), cette rencontre a réuni des universitaires islamologues, chercheurs, socio-anthropologues, théologiens, mais aussi des artistes du Maroc, du Sénégal et de France.

Elle inaugure également un cycle de débat d’idées régional autour de l’Islam et des sociétés, organisé avec le soutien de l’Institut français.

La deuxième étape, qui se déroulera en octobre prochain au Sénégal, sera consacrée à la réflexion entre l’Islam et ses approches féministes. Un projet qui permettra d’explorer et d’interroger de manière comparative et pluridisciplinaire la pensée et les pratiques de l’Islam, ainsi que sa place dans les sociétés.

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