Yassine Jabbar, un entrepreneur marocain à l’affût du marché cubain

Par Khalid EL HARRAK.

La Havane- Investir à Cuba n’est pas une mince affaire. Il requiert , comme partout, de la patience et la persévérance mais aussi une considération toute particulière au contexte politique et économique qui marque l’île caribéenne.

Conscient de toutes ces contraintes et risques, l’entrepreneur marocain, Yassine Jabbar, a pourtant franchi le pas et fait le pari de tenter sa chance sur ce marché émergent.

Fort de l’expérience acquise durant de longue date, et des succès réalisés par l’entreprise familiale, au Maroc comme au Canada, ce jeune entrepreneur casablancais, en quête de nouveaux horizons, a mis le cap sur Cuba.

“Dans un premier temps, nous avons envisagé de créer une entreprise de transformation de la volaille, notamment en raison des connaissances acquises dans ce domaine par l’entremise de notre expérience au Maroc”, a-t-il confié à la MAP.

“Nous avons commencé à négocier avec des entreprises agricoles à Cuba. Nous avons consacré plusieurs années à ce projet après une série de négociations. Il était toujours difficile de traiter avec la bureaucratie des entreprises d’État de Cuba”, se remémore Yassin Jabbar.

Face à ces obstacles qui entravent l’investissement, et pour gagner la confiance des autorités, le jeune entrepreneur mise sur sa devise :”adaptation, ténacité et efficacité”.

Et pourtant à bout de patience, il a failli abandonner son projet. Mais, l’opportunité s’est présentée d’investir dans le cadre de la Zone de Développement Spécial de Mariel.

Créée en 2013 à l’initiative du gouvernement cubain, cette zone vise à encourager les investissements étrangers dans le pays, en tenant compte de la nécessité de surmonter la situation économique et financière de l’ile, à cause notamment du blocus économique, financier et commercial des États-Unis.

Il décide alors de saisir cette occasion et de profiter des opportunités offertes par les réformes économiques entreprises par le gouvernement cubain tout en mettant à profit son expérience antérieure.

“Ma famille et moi-même avons alors pris la décision d’investir dans ce pays”, a confié à la MAP Yassine Jabbar, qui a admis que “ce n’est pas un chemin sans obstacles ni inconvénients, mais notre persistance nous a permis d’aller au-delà des difficultés rencontrées”.

Cuba importe la majeure partie de ce qu’il consomme et pâtit fortement de l’embargo imposé par Washington depuis 1962, ce qui complique l’importation de biens non alimentaires.

Pour ces raisons, Yassine Jabbar a décidé de lancer un projet d’investissement dans la ZDS Mariel, spécifiquement dédié à la production et à la commercialisation de produits issus des dérivés de papier tissu, de détergents liquides et de produits de nettoyage connexes.

Selon l’étude de faisabilité réalisée, l’investissement s’élèvera à 12 millions de dollars US et l’exploitation de l’usine est prévue pour 25 ans, indéfiniment renouvelable.

“Nous prévoyons des revenus annuels de plus de 30 millions d’euros à compter de la quatrième année d’exploitation, date à laquelle la période de récupération de l’investissement doit avoir pris fin”, a-t-il fait savoir.

Depuis sa première rencontre avec les responsables de la ZDS Mariel, en mai 2018, jusqu’à la livraison du dossier d’obtention de l’autorisation finale, six mois seulement se sont écoulés. À cet égard, les conseils fournis par un cabinet d’avocats local, le Bufete Internacional, ont certainement été décisifs.

“Lors de nos procédures, nous avons eu la chance de rencontrer des spécialistes cubains qui nous ont guidés dans notre projet. En particulier, l’avocat d’affaires Marcos Fraga, qui occupe actuellement le poste de directeur général adjoint de la société à Cuba, et qui a mis ses connaissances sur le sujet à notre disposition afin que notre projet puisse se concrétiser”, a-t-il dit.

Après un an de travail acharné, Yassine Jabbar touche au but. “Grâce à notre travail coopératif, notre projet d’investissement dans la ZDS Mariel est actuellement en cours. Nous pensons que cette zone constituera dans un avenir proche, non seulement le moteur économique de Cuba, mais également un centre de référence pour les investissements dans les Caraïbes et en Amérique centrale”.

Après avoir reçu les dernières autorisations nécessaires au démarrage de l’activité dans cette sorte de zone franche portuaire, emblème des réformes économiques initiées depuis quelques années par le dirigeant Raúl Castro, Yassine Jabbar n’est à présent plus qu’à un pas de concrétiser son entreprise !

Autre source de fierté pour ce jeune est le fait qu’il soit le premier Marocain à s’inscrire à l’ambassade du Maroc à La Havane récemment ouverte, à la faveur de son statut d’investisseur dans ce pays.

A cet égard, Il se félicite de l’encouragement qu’il a eu de la part de l’ambassadeur du Maroc à Cuba, Boughaleb El Attar, et de la volonté de la représentation diplomatique de promouvoir les liens économiques pour rapprocher davantage les deux pays.

Cuba est un pays doté d’un potentiel d’investissement prometteur, malgré les contraintes financières de l’île et les restrictions qui lui sont imposées, a-t-il dit, avant d’exprimer son espoir que son expérience puisse encourager d’autres investisseurs marocains à vouloir lui emboîter le pas.