Racisme virtuel: Combattre le mal par la sensibilisation

Racisme virtuel: Combattre le mal par la sensibilisation

vendredi, 16 avril, 2021 à 12:12

.-Par Nadia EL HACHIMI-.

 

Rabat – De par la remarquable tribune qu’ils offrent, leur audience à l’échelle planétaire et leur caractère participatif, les réseaux sociaux figurent parmi les principaux vecteurs de la diversité et du pluralisme. Toutefois, lorsqu’ils sont dévoyés à des fins haineuses, ces mêmes réseaux, de par leur effet démultiplicateur, peuvent donner lieu à des dérapages de nature raciste, xénophobe, voire misogyne.

Depuis le début de la crise sanitaire liée à la pandémie du coronavirus, le nombre d’utilisateurs des réseaux sociaux a explosé, à en croire les dernières données et tendances internationales dévoilées par le “Digital Report 2021”, qui fait état de 490 millions nouveaux utilisateurs entre janvier 2020 et janvier 2021 sur un total de 4,2 milliards d’usagers (+13,2%).

Les restrictions et les épisodes de confinement imposés à des millions, voire à des milliards de personnes ont eu pour effet de faire migrer les débats qui fâchent vers l’espace virtuel, favorisant au passage une mutation des comportements en ligne, en ce sens que les trolls ou autres internautes malveillants (groupes suprémacistes, chantres des théories du complot, partisans des opinions extrêmes…) sont désormais légion et surtout plus visibles.

Aussi, la banalisation du discours de la haine sur les réseaux est favorisée par le couvert de l’anonymat et le sentiment d’impunité qui en découle. C’est ce que confirme à la MAP Me Iliass Segame, avocat au barreau de Casablanca. D’après ce juriste qui s’intéresse de près aux sujets à l’intersection de la loi et du digital, l’anonymat favorise l’impunité et donne carte blanche aux dérives sur la toile.

Et de souligner que “les outils de communication mis à la disposition des utilisateurs par les fournisseurs de réseaux sociaux sont malheureusement susceptibles d’être exploités à mauvais escient. C’est ainsi que, sous couvert d’anonymat, certains utilisateurs malveillants se permettent de proférer et de relayer des propos ou des contenus incitant à la haine et au racisme”.

Le monde entier a été témoin de la prolifération d’actes incitant à la haine, à la discrimination et au racisme, dans le contexte de la crise sanitaire liée à la Covid-19, confie Segame, en citant l’exemple de certaines atteintes à des citoyens chinois ou d’origine asiatique aux débuts de la pandémie.

De son avis, les propos racistes sont bien présents sur la toile. Dans le cas du Maroc en revanche, “l’on assiste le plus souvent à l’expression, par certains internautes, d’un sentiment de +supériorité+ en raison de l’appartenance à une certaine catégorie sociale ou à certaines familles issues de régions particulières”.

Ce genre de discours n’a pas de “forme organisée et structurée, voire même politique”, assure le juriste, ajoutant que “ce phénomène n’est pas nécessairement assimilé au racisme”.

S’agissant des moyens pour lutter contre le racisme sur la toile, cet avocat estime que les fournisseurs de réseaux sociaux jouent un rôle fondamental quant à la régulation des contenus publiés sur leurs plateformes. “Ces derniers sont tenus de mieux réguler les contenus publiés sur leurs plateformes en temps opportun pour agir efficacement, en veillant surtout à ne pas faire la promotion de la haine et du racisme”, tranche-t-il.

Pour le sociologue Mehdi Alioua, il n’y a pas de preuve scientifique que le discours raciste est plus présent sur les réseaux sociaux qu’il y a dix ans ou vingt ans.

“La prolifération de ce type de discours n’est pas forcément mesurable aujourd’hui. Par contre ce que l’on peut mesurer, c’est la multiplication des échanges sur les médias sociaux et la diversification des moyens de communication digitale,” confie à la MAP le sociologue titulaire de la Chaire Migrations, Mobilités, Cosmopolitisme de l’Université Internationale de Rabat (UIR).

Selon lui, il y a eu toujours, dans toutes les cultures, des mots pour qualifier des personnes considérées comme différentes des normes sociales imposées.

Pour cet observateur avisé des migrations internationales, “débiter inconsciemment des propos haineux dans un café ou lors d’une altercation dans la rue n’est pas la même chose que de disséminer de tels propos sur les médias sociaux à la vue potentiellement de dizaines de milliers, peut-être même de millions de personnes”.

“Évidemment, ce genre de propos doit être combattu à travers la sensibilisation en montrant que l’autre est toujours l’autre de quelqu’un”, estime Alioua, mettant en avant le rôle des valeurs du métissage, de la cohabitation et de la tolérance en tant que rempart contre le discours de la haine aussi bien dans le monde réel que virtuel.

Le métissage, la coexistence, la tolérance et l’hospitalité ont toujours été les valeurs fondamentales du Maroc pour faire bloc aux propos et attitudes racistes, assure-t-il, se disant en faveur du renforcement de l’arsenal juridique avec des lois spécifiques au racisme en ligne.

De l’avis de Fatima-Zahra Quatabou, jeune militante marocaine, le problème mondial du racisme sur les réseaux sociaux est bien plus profond, dans la mesure où certains utilisateurs considèrent Internet comme “un défouloir”.

“Ils ne réalisent pas la gravité de leurs propos car ils sont cachés derrière un écran. Ils sont le reflet des énormes défis qu’il faut relever pour remédier à ce phénomène”, fait observer cette militante qui a créé une page sur Instagram pour sensibiliser un maximum de personnes aux effets et à la gravité du racisme et du discours de la haine.

Pour cette ingénieure opérant dans la recherche et développement (R&D), la conjugaison des efforts des institutions étatiques et des sociétés civiles, la sensibilisation à la gravité du racisme et la réactivité des internautes contre les trolls racistes serait à même de créer une dynamique positive pour lutter contre ce phénomène à l’échelle mondiale.

En définitive, la lutte contre le racisme virtuel présente un large champ d’action pour que tout un chacun puisse apporter sa pierre à l’édifice d’une “toile d’araignée” favorisant l’acceptation des différences, dans le respect et le partage.

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