Le Soufisme ou la dimension spirituelle comme rempart contre les tribulations du temps

Le Soufisme ou la dimension spirituelle comme rempart contre les tribulations du temps

vendredi, 4 décembre, 2020 à 11:41

Par Karim AOUIFIA
Rabat – Le “périple” humain dans la vie est fait de moments de bonheur, d’épanouissement et d’aspirations comme il est jalonné de passages à vide, de déceptions et d’épreuves. Tel est le destin de l’Homme qui négocie ce chemin en dents de scie, dans l’espoir de mener sa barque à bon port.

En temps de tribulations, comme celle que subit dans sa chair l’humanité toute entière à cause d’une crise sanitaire d’envergure, la réaction de l’Homme vacille entre un comportement réfractaire qui entraîne, chez certains, dépression, angoisse et repliement et une attitude résolue et “objective” puisant la force de sa résistance à l’adversité dans les vertus de la patience, de l’acceptation du destin et de la “remise confiante” en Dieu (Tawakkul) comme c’est le cas chez les Soufis.

L’Homme dans son essence cherche à appréhender la “théophanie des noms divins” qui sont ceux de la Majesté (Jalal) et ceux de la Beauté (Jamal), a indiqué à la MAP M. Yousef Casewit, professeur des études coraniques à l’Université de Chicago aux États-Unis, expliquant que dans le monde d’ici-bas, l’être humain découvre, à travers les moments d’épanouissement (Basst) et les instants de resserrement (Qabd), cette Beauté divine comme il goûte à la Majesté du Créateur.

Ceci dit, sous le prisme du Soufisme, dimension ésotérique et spirituelle de l’Islam, l’Homme ou plutôt le “murid” ou l’acheminant est le “fils de l’instant” (Ibn El Waqt) qui emprunte la voie “chevaleresque” de l’excellence (Ihssan) menant à la connaissance divine tout en gardant un pied ferme et inébranlable dans le “ici et maintenant”.

Le Soufi, relève le spécialiste français Eric Geoffroy, ne cherche pas à se retirer du monde. Son destin est de se réaliser ici et maintenant, si possible au +milieu de la foule+. Fils de l’instant, l’Homme doit développer ses qualités spirituelles dans les circonstances où Dieu l’a placée.

Ce moment présent, qui se veut un “trésor précieux” pour l’aspirant, est qualifié par les maîtres soufis comme l’unique point de contact avec la “Réalité éternelle”. Ayant à l’esprit cette composante essentielle de sa recherche sublime, l’objectif du murid, comme disait un shaykh soufi contemporain, est de “guider l’âme pour saisir le moment présent comme l’unique point de contact avec la Réalité éternelle au lieu de rêvasser à un passé sur lequel l’homme n’a plus aucun pouvoir et à un avenir qui n’arrive pas et vis-à-vis duquel l’Homme ne peut pas agir”.

Devant cet “Ici et maintenant” marqué par une pandémie atroce qui suscite une nostalgie envahissante à un passé proche et fait rêver d’un avenir “incertain”, l’aspirant à l’affermissement spirituel doit chercher réconfort et refuge dans l’abandon confiant en Dieu c’est-à-dire dans le moment où le cœur s’appuie entièrement et en toute félicité sur Dieu, l’infiniment Bon et Miséricordieux.

C’est cette vertu cardinale de l’acheminement vers la réalisation spirituelle que le célèbre maître soufi, Junayd de Bagdad, a soulignée dans une lettre à son compagnon de longue date, Abou Bakr Al Kisai, lorsqu’il a dit que “accepter c’est accueillir l’épreuve qui arrive avec endurance et bonne humeur”.

“L’acceptation +Rida+ c’est le deuxième degré de la connaissance chez celui qui accepte. La connaissance de Dieu est véritablement réalisée par le fait qu’il agrée constamment ce qui vient de Dieu”, ajoute Al-Junayd.

Aux yeux de M. Casewit, auteur de l’ouvrage “Les Mystiques de l’Andalousie: Ibn Barajan et la pensée islamique au 12è siècle”, “sans tribulations, ni découverte de la Majesté de Dieu, il serait difficile de goûter à la connaissance” des noms divins.

Il a relevé que le Saint Coran renvoie à maintes reprises à cette réalité que les vénérables ancêtres n’hésitaient pas à saisir afin de surmonter les miasmes de l’égo et les tentations des réalités contingentes pour, en définitive, appréhender le sens profond et absolu de l’Unité.

Pour ce professeur à la Divinity School à l’Université de Chicago, il y a lieu de faire preuve de “bonne attitude” (Adab) devant la “manifestation de la Majesté divine pour une spiritualité renforcée et un amour sincère pour la face de Dieu”.

“A travers le souvenir constant de Dieu (Dhikr), la persévérance sur la voie de l’excellence et le compagnonnage (Suhba), l’acheminant acquiert cette capacité de faire preuve d’objectivité face aux vicissitudes et à l’instabilité des choses comme c’est le cas en ce temps de pandémie”, confie à la MAP Abdelkrim. A, murid d’une tariqah basée au nord du Maroc.

Pour naviguer les “eaux troubles” menant à cette “station” avancée de la voie soufie, relève Abdelkrim, le murîd doit constamment faire montre, entre autres, de sincérité, de pureté d’intention (Sidq), de discipline et d’aspiration spirituelle (Himma).

Pour conclure, Abdelkrim cite un poème du fameux Cheikh marocain Ahmad Ibn Ajiba, qui a, lui-même, perdu ses fils à cause de la peste (1799-1800), dans lequel il prodigue une “sagesse éternelle”: “Si la nuit du resserrement descend sur toi, dans l’obscurité, accueilles la avec constance car la lumière brillera à nouveau. Sois calme et résigné devant ce qui arrive: le destin inéluctable qui vient du Seigneur”.

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